Les contrôleurs routiers du Québec veulent pouvoir porter une arme de service et relever dès que possible du ministère de la Sécurité publique, plutôt que d’une agence autonome de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ), afin d’être totalement « libres d’influences ».
Le président de la Fraternité des constables du contrôle routier du Québec, Éric Labonté, juge que l’enjeu – qui est discuté depuis des années – doit être au cœur des réflexions de la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault.
Cette dernière présentera mercredi à Québec son très attendu livre vert sur la réalité policière, un résumé des enjeux qui touchent la police afin de proposer, dans un deuxième temps, un nouvel encadrement. Selon nos informations, elle devrait annoncer la création de comités pilotés par des experts issus de différents milieux (policier, juridique, universitaire, etc.).
En entrevue avec La Presse, M. Labonté a rappelé que des contrôleurs routiers avaient saisi des armes « chargées à bloc » lors d’une intervention en Beauce, l’automne dernier. Dans ce cas précis, l’intervention se serait bien déroulée, a-t-il dit, mais « pour une question de santé et de sécurité au travail », les contrôleurs routiers – qui sont des constables spéciaux ayant suivi une formation de 21 semaines à l’École nationale de police du Québec – devraient être armés.
M. Labonté juge également qu’il est primordial que les contrôleurs routiers soient « libres d’influences » en ne relevant plus de la SAAQ. Le président de l’organisation syndicale a affirmé que l’agence gouvernementale prévoyait notamment des seuils de tolérance aux limites des charges transportées par les véhicules lourds sur les routes du Québec.
« Mais la loi n’a pas de tolérance sur les charges qu’on peut mettre dans un camion. […] Quand il y a une tolérance, c’est dur sur la mécanique. »
Si des limites de charge existent, c’est parce que des études avaient été faites. Quand on est en surcharge, on brise les infrastructures et […] [on peut entre autres faire plus facilement] de l’aquaplanage.
Éric Labonté, président de la Fraternité des constables du contrôle routier du Québec
Les contrôleurs routiers, qui piloteront avec les policiers les différents barrages contre l’alcool au volant pendant les Fêtes, voudraient aussi imposer des alcootests de façon aléatoire, comme peuvent le faire les policiers. Selon leur syndicat, cela ne leur serait actuellement pas permis.
Moins de délais au BEI
Ces derniers mois, les policiers de Montréal ont également fait pression sur le ministère de la Sécurité publique afin que les délais d’enquête du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) soient considérablement réduits.
Le BEI, constitué en vertu de la Loi sur la police, enquête entre autres « lorsqu’une personne, autre qu’un policier en service, décède, subit une blessure grave ou est blessée par une arme à feu utilisée par un policier, lors d’une intervention policière ou lors de sa détention par un corps de police ».
Le président de la Fraternité des policiers et policières de Montréal, Yves Francoeur, dénonce que les enquêtes du BEI durent en moyenne entre 12 et 17 mois, alors que son équivalent ontarien boucle les siennes en 6 à 7 mois, a-t-il dit.
Le Bureau des enquêtes indépendantes déclenche des enquêtes pour tout et pour rien. Il n’y a plus de discernement.
Yves Francoeur
À titre d’exemple, des policiers ont récemment sauvé in extremis un homme en crise psychotique qui s’était lancé par la fenêtre de son appartement. L’un des agents qui avaient été appelés sur les lieux l’a attrapé par le talon, lui sauvant du même coup la vie. Lui et son coéquipier ont depuis été honorés pour leur geste de bravoure.
« [Mais] si ça avait mal tourné, le policier aurait eu une épée de Damoclès au-dessus de la tête pendant 20 mois, même s’il avait agi de bonne foi en tentant de sauver la vie de l’individu », a affirmé à La Presse M. Francoeur.
« Le danger, c’est ce que les Américains […] appellent l’under policing. Je donne toujours l’exemple de policiers qui voient un homme dans un stationnement sombre vers 22 h avec un sac à dos. Les citoyens s’attendent à ce que les agents fassent une vérification. Mais avec les délais d’enquête comme ceux du BEI, des policiers peuvent se regarder et se dire : ‟Est-ce qu’on va le voir et peut-être se mettre dans le trouble, ou on continue et on reviendra si on reçoit un appel ?” », explique le président du syndicat policier.
Source LA PRESSE